Avec Les
Mandarins, Simone de Beauvoir écrit en 1954 son roman le plus ambitieux.
Cette fresque des années d’après-guerre marque la prise de conscience
définitive de son auteur pour l’histoire et pour sa propre historicité, la
conscience de sa responsabilité d’intellectuelle : on ne peut faire
autrement que de s’impliquer dans l’épaisseur du monde et l’aveuglement
antérieur est condamnable.
Cependant
ce roman touche aussi quelque chose de beaucoup plus profond chez Beauvoir qui
relève à la fois de la motivation même de l’écriture et du rôle social enfoui
de la littérature qui peut se résumer dans le concept de mélancolie. C’est ce
que nous espérons démontrer dans les pages suivantes en nous attachant au
contexte historique des Mandarins, au rôle emblématique de certains
personnages et à la structure même de ce roman qui valut à son auteur le prix
Goncourt 1954.
La mélancolie sociale
La
mélancolie apparaît avant tout comme une
dépression liée à la situation sociale. En effet, le deuil des morts dus à la
guerre ne peut se faire que dans un monde aux valeurs de plus en plus
brouillées, après le manichéisme de la Résistance, que les personnages vont
devoir apprendre. Eux qui croyaient retrouver leur vie d’avant-guerre vont
devoir endurer de nombreuses désillusions avant de comprendre le présent.
Paule veut
espérer que l’amour reviendra dans le cœur d’Henri. Vincent, en participant à
des expéditions punitives contre les anciens collaborateurs, perpétue le passé
et échappe aux réalités. Julien se réfugie dans un cynisme désespéré, Nadine
dans son passé, Lambert se rapproche des
anciens collaborateurs après avoir été un résistant. Apprendre le présent signifie donc revenir sur toutes ses valeurs.
Ainsi Henri au Portugal pense retrouver la passé mais il se rend vite compte de
son erreur : « C’est au-dedans de lui que quelque chose manquait. Ils
ne savaient plus bien ce que voulaient dire les vieux mots : bonheur,
plaisir » (p153, I). Quant à l’ambition née pendant la guerre de perpétuer
une presse libre : « encore un joli bobard » (p.229, I). Les
personnages qui avaient combattu avec les communistes découvrent la répression
en Union Soviétique. Même la certitude de Robert Dubreuilh concernant ses
devoirs et son rôle d’intellectuel vacille.
L’enjeu que
pose le roman est très bien exprimé dès ses premières pages par Anne :
« Mais avec ce passé
derrière nous, comment se fier encore à l’avenir ? Diégo est mort, il y a
eu trop de morts, le scandale est revenu sur terre, le mot de bonheur n’a plus
de sens : autour de moi c’est de nouveau le chaos. Peut-être que le monde
s’en sortira mais quand ? » (p.75, I)
Le dilemme est de savoir comment se tourner vers le futur et
la vie sans trahir le passé ni la mémoire.
La confusion des valeurs : Henri
Le cheminement d’Henri tout au long du roman, personnage à mi-chemin
entre le fanatisme littéraire, le pragmatisme politique de Robert et le goût de
l’absolu un peu morbide d’Anne, va nous permettre de mesurer la confusion des
valeurs dans ce nouveau monde dont il doit apprendre l’opacité. Les voyages,
son métier de journaliste, sa vocation d’écrivain, son ambition politique le
déçoivent et n’ont plus pour lui de saveur.
Lorsqu’il rencontrera Josette, dont il tombera amoureux en dépit de son passé
de son collaboratrice, il connaîtra une renaissance, mais finalement cette
aventure le conduira à une désillusion supplémentaire après la déception causée
par la rupture de son amitié avec Dubreuilh. Il se retrouve seul , touche le
fond avec le parjure accompli pour sauver Josette de la justice. Il est
finalement conduit à une tabula rasa. Petit à petit vont donc apparaître des
remarques mélancoliques, accompagnées de vifs sentiments dépressifs, sur la
vanité de tout : « Il n’aimait plus rien » (p .234,I) et
sur l’inutilité de l’action : « jamais de halte : rien n’existe
que l’avenir et il recule indéfiniment. Et voilà ce qu’on appelle
agir » (p.244, I)
Ces remarques portent aussi sur
la vanité de l’écriture et des articles politiques (« A quoi bon ?
« ) (p.251,I) ; quand il est avec Josette, il est en proie au
remords, son plaisir n’est jamais sans culpabilité. Il s’agit bien d’enterrer
le vieux monde ; ce deuil est d’autant plus difficile qu’il avait cru
possible le retour au statu quo. Le premier tome des Mandarins finit sur
un monologue très pessimiste qui marque bien son désarroi :
« « Peut-être que le mal est partout
« se dit Henri […] Si le mal est partout il n’y a aucune issue, ni
pour l’humanité ni pour soi-même. Est-ce qu’ il faudra en arriver à penser
ça ? » (p ,501, I).
Ces paroles
sont un écho de celles d’Anne : « La violence est partout »
(p.121,I), que répètera même Robert : « Mais il ne faut pas oublier
que l’horreur est partout » (p .68, II). Finalement la mélancolie est
l’apprentissage pour Henri de sa place dans ce nouveau monde, rendu douloureux
par un sentiment de culpabilité exacerbé ; culpabilité devant les
mendiants du Portugal, devant la maladie de Paule, à cause de son désir de ne
pas faire de politique et lorsqu’il se promène avec Josette dans les lieux
chics.
C’est que
la confusion des valeurs politiques et morales se produit parallèlement dans la
vie politique et dans la vie privée. Par exemple c’est au moment où Henri a la
révélation des camps de travail concentrationnaires en URSS, pays de l’espoir,
qu’il commence à frayer avec d’anciens collaborateurs, dans le monde de la
mode, pour pouvoir faire jouer sa pièce dont le thème est justement la
propension à l’oubli et aux compromissions. Le bien et le mal sont
inséparables. Mettre en perspective l’interférence des valeurs dans la vie
privée et dans la vie politique accentue l’impression de vanité de tout.
Un personnage emblématique : Diégo
Tout au
long des Mandarins les morts de la guerre vont être symbolisés par un
personnage emblématique : Diégo. C’est autour de cette figure d’adolescent
que va se cristalliser la mélancolie.
Dès son
premier monologue, Anne raconte son histoire au moment même où la victoire est
fêtée : dès que la vie reprend, elle se tourne vers les morts. Lorsqu’un
peu plus loin elle veut évoquer la douleur de la guerre, elle ne parle que de
Diégo (p.110,I). S’il peut représenter tous les morts et toute la
souffrance, c’est que dans son cas la mort signifie complètement le néant. Or,
comment porter le deuil d’un défunt qui n’a laissé aucune trace ? Si le
passage de la vie à la mort est escamoté, comment être sûr de la réalité des
choses, et comment être sûr de ne pas être déjà de l’autre côté ? A la moindre
inquiétude, Diégo revient comme une obsession ; ainsi dans la disparition
de Nadine, car le néant, c’est l’absence et le silence.
Cette
caractéristique que revêt ici la mort va entraîner une déréalisation des choses
et des gens, comme si, n’ayant pas de frontière, la mort rejaillissait sur
tout:
« Quand Robert est rentré le soir, il m’a
semblé que je le voyais de très loin à travers une lorgnette : une image
désincarnée avec du vide tout autour,
comme Diégo » (p.71, II).
L’amour américain d’Anne, dans ce qu’il a de tragique, est
lui aussi empreint du néant. Le bonheur est inséparable de son revers
noir :
« On ne m’avait privé de rien : et par
instants je m’arrêtais comme si j’avais tout perdu […] plus un signe […] pas un
murmure […] pas un vestige. » (p.62,I)
L’association avec la disparition de Diégo est claire, elle
le sera encore plus après la rupture :
« Non, je ne voulais pas
qu’un jour Lewis fût pour moi aussi mort que Diégo « (p.338, II)
« Le passé était bel et bien
mort. Une mort sans cadavre comme celle de Diégo : c’est ce qui rendait
difficile d’y croire ». (p.339,II)
Le passé est donc comme le néant, « un vide qui
engloutissait tout » (p.409, II) et qui implique une perte du sens.
Ainsi Lewis
n’aura-t-il été qu’un sursaut dans l’existence d’Anne et la pulsion de vie
régénérée pendant quelques mois, en retombant, se greffe sur toutes les
disparitions de la guerre réveillées à nouveau. Lorsque Anne refuse de vivre
avec Lewis aux Etats-Unis, les raisons qu’elle donne semblent peu
pertinentes :
« Mais à mon âge on ne peut pas jeter toute sa
vie par dessus bord : c’est trop tard, nous nous sommes rencontrés trop
tard […] je n’écris pas ; mais des choses comptent pour moi autant que vos
livres pour vous. » (p.245 ;II)
Or on ne voit pas précisément lesquelles : elle n’est
pas très attachée à sa fille, Robert n’a pas besoin d’elle et son travail la
dégoûte de plus en plus. A moins que ce ne soit justement ce deuil collectif à
accomplir qui l’empêche de partir : il ferait de son exil une trahison.
L’association
de l’amour à la mort pas le dénominateur commun qu’est le néant implique en
négatif un troisième élément : la littérature. En effet, si l’angoisse et
le désespoir naissent de cette mort sans cadavre ou de cet amour épuisé dont il
ne reste rien, l’écriture est issue aussi de ces sentiments puisque son projet
est précisément de les transcender. On touche peut-être ici l’essence même de
la littérature chez Simone de Beauvoir : abolir le temps pour donner un
présent absolu.
Anne : le soleil noir
Si l’épisode
amoureux entre Lewis et Anne témoigne du
refus de l’oubli, de la résurgence du néant, et de la culpabilité, il permet
aussi de mettre en valeur un rôle féminin traditionnel : celui de la femme
gardienne des traditions et des coutumes, ici gardienne de la mémoire.
Dans cette
perspective, Paule accentue les traits d’Anne, comme Elizabeth dans L’Invitée
exacerbait les traits négatifs de Françoise. Plus qu’Anne, Paule se réfugie
totalement dans le passé. Toutes deux associent leur chambre ou leur studio au
tombeau, mais Anne a mis en place tout un système de défense, autour de Robert,
alors que Paule se laisse aller « terrée dans son trou toute la
journée » (p.470,I) au point de devenir folle. Ainsi la cause de la folie,
considérée comme un état partiellement volontaire, et celle du suicide – qui
tentera Anne – semblent bien la mélancolie, le refus du présent.
Anne, avant la rencontre avec
Lewis, se comporte comme si elle voulait se rapprocher de l’état de
léthargie :
« Pendant cinq ans j’avais vécu chaste, sans
regrets et je pensais que je le demeurerais à jamais : c’était naturel que
ma vie de femme fût finie : il y avait tant d’autres choses qui étaient
finies à jamais » (p ;115,116,I)
La nuit passée avec Scriassine la confirme dans cette
opinion. Cependant, l’aventure avec Lewis est décrite comme une véritable
renaissance, « …et mon corps se levait d’entre les morts ». La force
de cette réaction indique une insatisfaction chronique.
Cette
résurrection par les sens va se prolonger par un véritable dédoublement tel
qu’il existe avec Françoise dans L’Invitée, ou Régine dans Tous Les
Hommes sont mortels, souvent exprimé par le recours des personnages au
miroir . Il se concrétise dans Les Mandarins par les différences de
lieux. En effet, dès qu’elle met le pied sur le continent américain Anne est
une autre personne : elle n’est plus prisonnière du regard de son
entourage :
« Et j’ai senti que ma vie me quittait, ma
vieille vie avec ses soucis, ses fatigues, ses souvenirs usés […] une femme
toute neuve. » (p54, II)
Corollairement le
retour à Paris signifie le retour à la vieille vie. C’est pourquoi le jour du
départ est comparé à un enterrement : « hall funéraire »,
« morte », « viatique », « au-delà » (p.59, II)
En partant, une partie d’elle-même meurt. La litanie funèbre de la fin du roman
exprime cette conception d’une personnalité fragmentaire et morcelée :
« Que de morts je porte en moi !Morte la
petite fille qui croyait au paradis, morte le jeune fille qui pensait immortels
les livres, les idées et l’homme qu’elle aimait, morte la jeune femme qui se
promenait comblée dans un monde promis au bonheur, morte l’amoureuse qui se
réveillait en riant dans les bras de Lewis […] elles non plus, elles n’ont pas
de tombe ; c’est pour ça qu’on leur interdit la paix des enfers ;
elles se souviennent encore, et elles appellent en gémissant le sommeil. Pitié
pour elles, enterrons-les toutes à la fois ; » (p.497,II)
La
douleur qui semble se déployer par l’anaphore coupe tout lien entre les
différentes étapes de la vie. Chacune est une vie autonome dont il faut faire
le deuil indépendamment.
Cependant
le passé est une obsession parce qu’il permet aussi de fuir les désagréments du
présent. Ainsi lorsqu’ Anne envisage de provoquer une liaison avec Lewis, elle
se dit :
« Dans huit jours la parenthèse serait
refermée : en sécurité dans ma vie je sourirais avec indulgence à tous mes
souvenirs. » (p.36,II)
Pour se défendre elle se situe dans un futur qui déplace le
présent vers le passé, et ainsi l’escamote. Cette histoire d’amour a été
entreprise du point de vue du futur, qui est le point de sa fin, donc de la
mort.
A partir
d’une histoire vécue, Simone de Beauvoir reprend un thème littéraire
éculé : celui de l’amour impossible, avec toute la psychologie qu’il
entraîne. On pourrait lui appliquer cette citation d’Adolphe :
« Malheur à l’homme qui, dans les premiers
moments d’une liaison d’amour, ne croit pas que cette liaison doit être
éternelle. »(1)
Mais c’est la femme ici qui est l’instigatrice de
l’aventure.
Les vanités
L’omniprésence
du passé renforce l’impression que la mort ronge tout. Le mot
« mort » est le premier utilisé par Anne dès la page 39. Si
l’obsession de la vieillesse lie ce roman à L’Invitée, elle est
subordonnée désormais à un thème plus vaste : « Notre vie est là,
lourde comme une pierre, et elle a un revers que nous ne connaissons
pas ». (p.341, I)
Dans le
dernier chapitre, derrière la présence de Robert, Anne voit son cadavre :
« Et moi je regardai ses dents. Il n’y a que ça de
loyal dans un corps : les dents où le squelette se découvre ; je
regardais le squelette de Robert et je me disais : « il attend son
heure » «. (p.494,II)
La récurrence de ces images, présentes aussi dans La
Force des Choses, laisse suggérer que Simone de Beauvoir se situe dans la
tradition des vanités du XVII ème siècle dont parle Philippe Ariès dans L’Homme
devant la mort :
« Les vanités des XVI ème et XVII ème siècles
– elles deviennent plus rares au XVIII ème siècle – sont la combinaison de deux
éléments, l’un anecdotique qui fournit
le sujet, le thème (portrait, nature morte), l’autre symbolique, une image du
temps et de la mort .» (2)
Ces vanités, en passant par la littérature, gardent leur
fonction : pousser à méditer sur la fragilité de la vie. Simone de
Beauvoir reprend la leçon de L’Ecclésiaste et se situe alors dans la lignée de
Bossuet et de Pascal, « le monde, infiltré par une solution de mort, est
devenu suspect d’un bout à l’autre » (3).
Cette image
précise du dernier chapitre des Mandarins : « La mort est
là ; elle masque le bleu du ciel […] une bulle que je vais crever »
(p.495, II), est identique à celles que
cite Philippe Ariès :
« Cette vie n’est plus
considérée que comme « une chandelle qui a consumé sa matière » par
Bossuet, « une fumée dans un coup de vent » par l’Allemand Cyphrius
(1640), « une gouttelette de rosée qui est tombée sur une fleur de
lys » par Binet (Essay des Merveilles), « une goutte de
rosée » ou « une bulle d’eau ou de savon » pour l’Anglais
Crashaw, homo bulla « (4)
Normalité ?
Cette perte
du sens aboutit finalement à une remise en question de ce que la société
considère généralement comme normal. Dès le début du roman, la nécessité de son
métier de psychiatre n’est plus évidente pour Anne. La guerre l’ayant
convaincue de la négativité de la finalité historique, elle ne considère plus
comme important d’adapter des individus à la société en leur montrant la
voie de l’authenticité (p.92,I). Elle en vient à se poser cette question,
véritable appel du vide : « Une existence normale, qu’y a -t-il de
plus déraisonnable ? » (p.296,I). En effet, la folie de Paule ,
équivalent structural de sa passion pour Lewis, est très valorisée :
« Mais je me demandais avec inquiétude […] de
quoi au juste vont-ils la guérir ? Qui sera-t-elle après ? oh !
Somme toute c’était facile à prévoir. Elle serait comme moi, comme des millions
d’autres : une femme qui attend de mourir sans plus savoir pourquoi elle
vit » (p.219, II)
La
souffrance est ainsi l’antidote de l’ennui. Elle est liée au souvenir, à la nécessité
de la mémoire dans un deuil qui permet l’épaisseur de la personnalité.
Cette
vision du monde traduit paradoxalement un amour pathétique de la vie. La
souffrance doit se vivre jusqu’au bout parce qu’elle est le revers noir d’un
soleil. La guérison dès lors n’est qu’une amputation : on retranche un
morceau du passé comme s’il s’agissait d’un organe malade. Si la normalité n’a
plus de norme, nous débouchons sur un monde renversé.
Le monde à l’envers
Son point
de départ est la mort ; seule certitude, elle aboutit à un cogito d’un
type particulier : « je suis mortelle donc je suis ». A partir
de ce postulat vont être considérées comme des vérités ce que la société prend
soin d’oublier :
« Je retrouverai mes idées en ordre, toujours
dans le même ordre, et aussi les choses et les gens […] la raison qui maintient
l’ordre : la passé en arrière, l’avenir en avant, invisible, la lumière
séparée des ténèbres, ce monde émergeant victorieusement du
néant… »(p.498, II)
Ces idées expriment la découverte de la convention sociale
sur laquelle est bâti le sens. Tel qu’il est, il ne paraît plus valable à Anne.
La passion et la folie sont dès lors contestataires, c’est peut-être pourquoi
cette dernière, avec quelques variantes est récurrente dans les romans de
Beauvoir : avec Régine, à la fin de Tous Les Hommes sont Mortels,
Laurence dans Les Belles Images, qui est anorexique, Murielle, dans La
Femme Rompue.
Bien que
son expression soit souvent ambiguë – contestataire, elle est aussi une
tricherie liée à la mauvaise foi – son sens est clair dans Les Mandarins :
Je ne comprenais plus pourquoi il est bon que les gens
dorment la nuit, qu’ils fassent l’amour avec facilité, qu’ils soient capables
d’agir, de choisir, d’oublier, de vivre » (p.376,II)
Cette désadaptation pose donc la question du rapport à
l’être au-delà de ses apparences.
Le point de
vue d’Anne conteste celui de Robert, homme d’action infatigable, orienté vers
le futur, qui « invente » des solutions, ne connaît pas le repli sur soi.
La volonté d’Anne, à la fin du roman, de mourir, est un écho direct au
recommencement de Robert et Henri. Ces deux personnages opposés, dont Henri est
en quelque sorte la synthèse, traduisent la double postulation de l’auteur. En
effet, ces variations sur le vanitas vanitatum, dialogue entre l’absolu et le
relatif, sont un thème fondamental dans l’œuvre de Beauvoir .Elle raconte
dans Les Mémoires d’une jeune fille rangée :
« Le jour où j’eus dix-neuf ans, j’écrivis,
dans la bibliothèque de la Sorbonne, un long dialogue où alternaient deux voix
qui étaient toutes les deux les miennes : l’une disait la vanité de toutes
les choses et le dégoût et la
fatigue ; l’autre affirmait qu’il est beau d’exister, fût-ce
stérilement » (5).
C’est la même lutte entre ces deux voix
qu’elle développe dans Pour une morale de l’ambiguïté et dans
Pyrrhus et Cinéas, et qu’elle reprend dans tous ses romans, Tous les
hommes sont mortels en étant l’expression la plus accomplie :
l’immortalité de Fosca est la radicalisation de son goût pour l’absolu, mais
par cette raison même, elle entraîne l’aversion de la vie ; dans L’Invitée,
Xavière, tout comme sa sœur jumelle Hélène dans Le Sang des Autres,
représentent la même valeur combattue par Françoise et Blomard.
Le
dépassement de cette double postulation a été permis chez Simone de Beauvoir
par l’écriture. Elle assure sa perpétuelle résurrection, en englobant et
immortalisant toutes les morts de sa personnalité fragmentée et en faisant de
la littérature un tombeau ouvert. C’est pourquoi ces romans ne sont pas
platement réalistes : cette nécessité de chasser encore et toujours la
vanité leur donne leur véritable profondeur.
Structure de la mélancolie : la répétition
La
mélancolie ne s’exprime pas seulement par le récit, mais aussi par la structure
romanesque.
Parlant des Mandarins dans
La Force des Choses, Simone de Beauvoir écrit :
« Un des principaux thèmes
qui se dégage de mon récit est celui de la répétition au sens que
Kierkegaard donne à ce mot : pour posséder vraiment un bien, il faut
l’avoir perdu et retrouvé. Au terme du roman, Henri et Dubreuilh reprennent le
fil de leur amitié, de leur travail littéraire et politique ; ils
retournent à leur point de départ ; mais entre temps toutes leurs
espérances étaient mortes. Désormais au lieu de se bercer d’un optimisme
facile, ils assument les difficultés, les échecs, le scandale qu’implique toute
entreprise. » (6)
Puisqu’elle évoque le rôle de l’amitié et des projets
littéraires, nous n’y insisterons pas. Rappelons cependant la symétrie qui
existe entre le début du roman et sa fin : dans les dernières pages, c’est
encore Dubreuilh qui décide Henri à se joindre à son entreprise politique et à
s’associer à son projet de journal, comme au début du roman, il l’avait
convaincu de participer au S.R.L et de lui céder L’Espoir On a donc l’impression qu’une boucle a été
bouclée. Les personnages repassent par les mêmes événements, mais à un niveau
supérieur d’intégration.
Le schéma de l’amitié perdue et retrouvée se
trouve étoffée par la reproduction d’autres exemples mis en abyme qui créent,
comme dans L ‘Invitée, un jeu de miroir. Ainsi l’amitié entre Henri
et Lambert, basée sur un lien filial, mettant face à face un jeune ambitieux et
un écrivain confirmé semble reproduire celle entre Henri et Dubreuilh à ses
débuts. En outre le lien entre Volange et Henri est aussi celui d’une ancienne
amitié, mais définitivement rompue.
Un autre
épisode qui permet à la structure romanesque d’élaborer une boucle est celui du
mariage final de Nadine et Henri qui reproduit la situation du couple formé par
Anne et Robert. En effet, Robert, écrivain célèbre, a soixante ans, Anne
trente-neuf, leur fille Nadine, dix-huit, et Henri, trente-cinq. La différence
d’âge dans les deux cas est importante : vingt et un an séparent Robert et
Anne, dix-sept Nadine et Henri. En outre dans les deux cas l’homme est un
intellectuel de renom. Enfin, Henri et Nadine ont un enfant tout de suite,
comme Robert et Anne, et le manque de tendresse de Nadine à l’égard de sa fille
semble reproduire la sècheresse de sa mère envers elle.
Donc encore
une fois une situation similaire est mise en place au début et à la fin du
roman ; cependant la répétition ne signifie pas la reproduction du
même : chaque fois, elle s’effectue à un autre niveau. Si le premier monologue
d’Anne débute par le mot
« mort » (p.38, I), son histoire se termine par une velléité de
suicide. Cette répétition implique donc une transformation : le vouloir
vivre est encore plus faible mais il a vaincu en se radicalisant. Cette
structure en spirales correspond à celle dont parle Sartre :
« une vie se déroule en spirales ; elle
repasse toujours par les mêmes points mais à des niveaux différents
d’intégration et de complexité. »(7)
Le décentrement
Le
développement parallèle de deux narrations dans Les Mandarins, qui
suivent toutes deux l’ordre chronologique, provoque comme un jeu dans le récit
qui aboutit à un véritable décentrement des sujets.
D’un
chapitre à l’autre et donc du point de vue d’Henri à celui d’Anne, le temps se
recoupe à l’aide de quelques rappels et est dépassé ; ces rappels
provoquent des enchâssements dans la fiction : le récit revient sur
lui-même pour mieux se développer. Ainsi au début du chapitre III Henri et
Nadine sont au Portugal ; la suite, où Henri est personnage focal, raconte
le retour et la vie à Paris, jusqu’à la page 263. A la page 265 commence
le chapitre IV ; une page plus loin, nous pouvons lire :
« …Nadine est rentrée à Paris […] Pendant deux
jours elle nous a décrit impétueusement le Portugal, elle racontait mal
… »
Comme dans toutes ces analepses, l’histoire est
élidée ; issues des changements de perspectives narratives, elles servent
surtout à faire le lien entre les chapitres : chacun s’ancre dans le temps
du chapitre antérieur. Le IV finit sur la décision d’Anne d’accepter une
invitation pour un congrès en Amérique. Le chapitre suivant concerne Henri,
nous lisons : « S’il me parle avec tant de confiance, c’est qu’Anne
n’est pas là » (p.431) : nous en concluons donc qu’elle est partie est
que le temps de ce chapitre est postérieur à celui du précédent. Un seul
chapitre est clos sur lui-même : le IX. Ainsi le changement de point de
vue déstabilise la fiction. Bouleversé par les rappels, le récit est décentré.
Ce
décentrement est accentué par la différence de tonalité et de temps employés
dans le récit d’Anne et dans celui d’Henri. Dans les chapitres où Henri est
personnage focal, Simone de Beauvoir utilise l’imparfait et le passé
simple ; dans ceux où Anne l’est, en plus de l’imparfait au début de chapitre
qui sert à exposer le cadre, elle se sert du passé composé et du présent. Or,
selon Harald Weinrich, si l’imparfait est un temps narratif, le passé composé
est un temps commentatif. Il écrit :
« Il
[le passé composé] donne à la description le caractère d’un règlement de
comptes […]. Le passé composé est aussi le temps de la
« responsabilité » « (8).
Le passé
composé est donc le temps des bilans, des retours sur soi, ce que révèlent
aussi les fréquents adverbes. La narration d’Anne est un discours qui s’adresse
directement à quelqu’un. C’est pourquoi le récit d’Henri, à l’imparfait et au
passé simple « présent avec recul esthétique » (9) est celui dont
l’action se passe dans le présent, le moment de la lecture. En effet :
« Le prétérit […] signale qu’il y a récit. Sa
fonction n’est donc pas de marquer le passé. Il serait injustifié de confondre
passé et récit […] Nous avons déjà cité des romans dont l’action franchit le
seuil du présent, ou même s’installe dans l’avenir, sans cesser pour autant de
recourir aux temps narratifs. »(10)
Dans le récit d’Henri
l’action se déroule au moment de la narration ; le passé indiquant un
contrat de lecture plus qu’un temps. L’emploi de la troisième personne accentue
cette impression, d’autant qu’il s’agit d’un point de vue interne. Le récit
d’Anne au contraire est mené à la première personne du singulier ;
narrateur et personnage sont identiques, ce qui accroît le sentiment d’une
reddition de comptes : Anne narratrice commente Anne personnage, comme dans l’autobiographie. Cette
scission de l’identité provoque d’ailleurs une dissociation entre l’histoire et
la narration : celle-ci est mise en valeur et ralentit en quelque sorte
l’histoire.
En plus de ces différences de points de vue et de temps
grammaticaux, des chapitres d’Anne à ceux d’Henri, deux tonalités résonnent. Si
Anne raconte son aventure américaine, point extrême de la dissymétrie de ces
deux narrations sur une même histoire, c’est bien qu’elle vit avant tout dans
les brisures de son identité. Les chapitres d’Anne agissent comme un
contrepoint pessimiste de ceux d’Henri. Ils sont la pause dans l’action où le
récit se réfléchit lui-même et ralentit. Personnage récepteur, Anne est le
centre ordonnateur du tout qui permet les relations entre les différents
personnages du roman. C’est pourquoi, affinant la structure éclaté du Sang
des Autres, Simone de Beauvoir a fait s’enrouler le récit d’Anne autour de
celui d’Henri : en s’enroulant autour de la durée progressive de ce
dernier, la narration d’Anne fait perdre au roman la certitude de son centre.
Des instances narratives
en décalage
Ce déséquilibre est encore plus net si l’on considère que
ces deux narrations ne débutent pas sur le même niveau temporel. Dans le
dernier chapitre en effet comme dans la deuxième partie du premier, le temps de
la narration rejoint le temps de l’histoire. Dans ces deux chapitres où Anne,
personnage focal, est entre le sommeil et la veille, le présent domine malgré
un très bref passage à l’imparfait dans le dernier chapitre. Cet imparfait, qui
succède au présent après un alinéa, traduit une perte de la notion temporelle
chez Anne ; on peut penser qu’il est utilisé pour signifier qu’elle s’est
endormie et qu’elle a rêvé ; ce fait parvenu à la conscience d’Anne
personnage n’est pas mentionné par Anne narratrice. Ce dernier chapitre,
proposant une sorte de bilan par la recherche des causes qui ont pu la pousser
au suicide, établit une clôture. Pourtant il est aussi un écho du premier
chapitre qui semble directement lui succéder. En effet, lorsqu’elle revient de
son vertige de la mort, Anne se rend compte de son égoïsme :
« Je ne peux pas
leur infliger mon cadavre […] je mourrai seule ; pourtant ma mort ce sont
les autres qui la vivront. » (p.499,II)
Or, si
l’on met entre parenthèses sa dernière conversation, au présent, avec sa
famille, concrétisant sa remontée vers la vie, on se rend compte que son
premier monologue au début du roman prolonge cette méditation funèbre :
« Non ce n’est pas
aujourd’hui que je connaîtrais ma mort ; ni aujourd’hui ni aucun jour. Je
serai morte pour les autres sans m’être vue mourir. » (p.38, I)
Dans les
deux chapitres elle évoque le même
dégoût pour le recommencement et le même souvenir de son adolescence :
« Mais de nouveau,
comme en ce jour de mes quinze ans où
j’ai crié de peur, la mort me traque. Je n’ai plus quinze ans. »
(p.493,II)
« mais un jour j’ai
compris qu’en renonçant à lui (à Dieu) je m’étais condamnée à mort ;
j’avais quinze ans… » (p.39, I)
Certes
la fin du premier chapitre est très pessimiste alors que la fin du dernier
laisse poindre une faible lueur :
« Qui sait ?
Peut-être un jour serai-je de nouveau heureuse. Qui sait ? »
(p.501,II)
Il y a
donc un brouillage dans le début de la narration d’ Anne. L’instance narrative
se situe en fait dans l’épilogue comme s’il était la base de son discours dans
lequel elle commente sa dépression et elle se prolonge dans la narration du
premier chapitre. On retrouve ainsi le mouvement rétrospectif de L’Invitée,
neutralisé partiellement ici par la narration d’Henri. En effet, cette
dernière, vectorielle, est le garant de l’ordre chronologique du roman. Le
récit d’Anne, par les retours en arrière et le brouillage de l’instance
narrative est construit comme une ellipse (« manque » en grec). Si l’histoire racontée est bien la même
(comment s’adapter à la vie après-guerre), la narration est double :
fondue à la chronologie dans le récit d’Henri, elle est vectorielle, mais étant
brouillée dans le récit d’Anne, la temporalité est finalement brisée. Le récit
avance vers les causes de sa dépression, donc vers son début. Les Mandarins
est bien alors une écriture du manque, comme s’il s’agissait de cerner une
absence innommable, mais par là même source de mots.
Une
écriture du deuil
La logique de la mélancolie
rapproche la littérature de l’accomplissement du deuil, à la fois par le manque
qu’elle dessine mais aussi par l’introjection qu’elle met en place.
Celle-ci
en effet apparaît comme le moteur principal de l’écriture de Simone de
Beauvoir. Geneviève Idt a pu écrire à propos de La Cérémonie des Adieux :
« Pour Simone de
Beauvoir, en tout cas, le travail du deuil s’achève dans et par l’écriture, et
son œuvre est jalonnée de récits de morts qui prémunissent la survivante contre
le retour des fantômes » (11)
L’autobiographie
et un grand tombeau pour des amis ou des parents morts : Zaza dans Les
Mémoires d’une jeune fille rangée, Camille , Violette Leduc, Madame Mancy,
dans La Force des Choses et Tout compte fait, où l’ordre
thématique permet une partie consacrée aux morts les plus récents. Les récits
autobiographiques viennent compléter cette litanie funèbre : Une Mort
très Douce raconte la mort de sa mère, La Cérémonie des Adieux les
dernières années de Sartre. Mais le travail du deuil se manifeste aussi bien
dans l ‘œuvre romanesque, Les Mandarins, mais aussi Le Sang des
autres où la perte à surmonter est celle d’un ami puis d’Hélène, La
Femme Rompue et Les Belles Images où il faut apprendre à vivre avec
l’absence du mari. Tous les hommes sont Mortels raconterait presque un
deuil impossible : en voulant conjurer sa peur de la mort Simone de
Beauvoir imagine un immortel que son immortalité rend insensible à tout. Ainsi
pour elle la littérature est-elle le tombeau des morts. Plus la douleur devient
forte, plus l’écriture devient blanche. « Se préserver du retour des
fantômes » en immortalisant ces défunts, et donc en écrivant, est la
condition pour sauvegarder sa propre capacité à vivre. D’ailleurs la structure
circulaire des romans représente une crypte, un refuge. La spirale semble
signifier le besoin incessant de venir puiser dans le passé la force d’aller de
l’avant.
Si on rapproche cette fonction de
l’écriture des conclusions que tire Philippe Ariès dans L’Homme devant la
Mort, on peut mesurer à quel point Simone de Beauvoir accorde à la
littérature un rôle social majeur.
Philippe Ariès étudiant l’attitude
de l’homme face à la mort, du Moyen-Age jusqu’à nos jours, définit ainsi
l’attitude de notre époque : parce que la mort est désormais perçue comme
laide et inconvenante, on essaie de cacher au malade sa fin prochaine, la
laissant se passer dans le mensonge :
« Un lourd silence
est ainsi étendu sur la mort. Quand il se rompt […] c’est pour réduire la mort
à l’insignifiance d’un événement quelconque dont on affecte de parler avec
indifférence. Dans les deux cas, le résultat est le même : ni l’individu
ni la communauté n’ont assez de consistance pour reconnaître la mort ».
(12)
Mais
cette évacuation ne peut de toute façon que s’accompagner d’une nouvelle
imagerie angoissante. Cependant toute la manifestation traditionnelle du deuil
se trouve refoulée, frappée d’interdit :
« Une nouvelle
situation apparaît donc vers le milieu du XXème siècle, dans les parties les
plus individualisées et les plus embourgeoisées de l’Occident. On est convaincu
que les manifestations publiques du deuil, et aussi son expression privée trop
insistance et longue, sont de nature morbide ». (13)
Or le
deuil est une nécessité individuelle et sociale qui seule permet de guérir du
chagrin et d’apprivoiser la mort.
Dans cette perspective
l’ écriture de Simone de Beauvoir serait un acte individuel et social de
la plus grande importance. Parlant des morts qui l’ont touchée, elle accomplit
par l’écriture un travail du deuil qui lui permet de surmonter la douleur,
d’exorciser la peur du néant, et qui permet aussi à la communauté de retrouver
un rite social perdu. En même temps Beauvoir érige de son vivant son propre
monument funéraire. Le terme de communication qu’elle se plaît à employer en
parlant de la littérature (14) désigne donc un indicible se situant dans le
registre du rituel
Simone de Beauvoir a dit dans une
conférence :
« Le roman peut au
contraire rendre le sens qui est à l’horizon de mon expérience mais qui
n’arrive pas à être enfermé en elle avec une plénitude complète.
Personnellement une des raisons pour lesquelles j’ai écrit, c’est cette inadéquation
des moments vécus et de la réalité qui hante mon horizon… »(15)
L’adéquation
consisterait à pouvoir prendre le point de vue de la mort sur sa vie et à
totaliser les trois dimensions temporelles du passé, du présent, du futur.
La notion de mélancolie nous semble
particulièrement bien désigner un élément fondamental de l’oeuvre de Simone de
Beauvoir – en place dans Les Mandarins mais récurrent dans l’œuvre
romanesque aussi bien qu’autobiographique – à la fois par les thèmes exprimés,
issus d’événements qui viennent d’être vécus, par la dimension réaliste des
personnages, largement inspirés de personnes réelles vivant dans le cercle de
l’auteur, mais aussi par la structure en spirale de ces romans. Le centre, la
certitude font défaut parce que la perception de la mort et de la vanité de
toute chose colorent de négativité la réalité. Dès lors il est fondamental de
s’arracher au néant et de laisser sa trace et celle de ceux qui lui sont chers
dans la pérennité d’une feuille blanche.
C’est cette ambition enfouie qui
révèle sans conteste la marque d’un écrivain majeur de notre XXème siècle.
Muriel
Olmeta
Docteur
ès lettres de l’université de Paris-X
Paru dans Simone de Beauvoir studies, Simone de Beauvoir, Twenty years later, volume 22.
Paru dans Simone de Beauvoir studies, Simone de Beauvoir, Twenty years later, volume 22.
Notes
1) Constant (Benjamin), Adolphe,
Gallimard, folio, 1973 p .59
2)
Ariès (Philippe), L’Homme devant la mort, Le
Seuil, Coll. Historique 1977, p.322
3)
Idem, p.327
4)
Idem, p.327
5)
Beauvoir (Simone de), Coll. Folio, p320
6) Beauvoir,
‘Simone de) coll. Folio, tome
1 p., 369
7)
Sartre (Jean-Paul), Questions de méthode,
Gallimard, coll. Idées, 1960, p.149
8)
Weinrich (Harald), Le Temps, Seuil, coll.
Poétique, Paris,1973, p.92
9)
Sartre (Jean-Paul), Situations I, Gallimard, coll
.Idées, 1947, p20
10) Weinrich, (Harald), Le Temps,
p.100-101
11) Idt (Geneviève), « La Cérémonie des
Adieux de Simone de Beauvoir, : rite funéraire et défi littéraire »,
Revue des Sciences Humaines n°192, octobre-décembre 1983.
12) Ariès (Philippe)
L’Homme devant la mort, p.608
13) Idem,
p574
14) Simone
de Beauvoir a dit dans un débat : « Si la littérature cherche à
dépasser la séparation au point où elle semble le plus indépassable, elle doit
parler de l’angoisse, de la solitude, de la mort parce que sont justement des
situations qui nous enferment le plus radicalement dans notre singularité […]
Chaque homme est fait de tous les hommes et il ne se comprend qu’à travers eux
, il ne les comprend qu’à travers ce qu’ils livrent d’eux et à travers lui-même
éclairé par eux. » Edité dans Que peut la littérature ?
Edition 10/18, 1965, repris partiellement dans Jeanson, (Francis), Simone de
Beauvoir ou l’entreprise de vivre, Seuil, 1968, p. 273-274.
15) Beauvoir
(Simone de ), « Mon expérience d’écrivain », dans :Claude
(Francis) et Gontier (Fernande),Les Ecrits de Simone de Beauvoir, Paris,
Gallimard, 1979, p.349